Extrait de la page 3 : "Une rencontre impromptue"
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Ce samedi 8 octobre 1966, je me rendais au 53ème salon de l'Automobile de la porte de Versailles pour admirer et acquérir, avec mes premières payes de "designer", le tout nouveau cabriolet Peugeot 204 Grand Luxe. Ce serait la première automobile que j'achèterai neuve. J'en avais déjà choisi la couleur : rouge "China"…!
Les grandes marques Françaises étaient regroupées dans le hall central.
Par curiosité, je commençais la visite du salon par les halls périphériques, mêlant les marques étrangères, les petits constructeurs et les pièces détachées. C'est là que, juste à côté d'une belle MGB, je tombais en arrêt devant un engin insolite.
Il avait 4 roues et un volant, mais ce n'était pas vraiment une automobile. C'était un plateau sur roues, de trois mètres de longueur, de couleur vert foncé, ouvert jusqu'en dessous des sièges.
Il était bâché d'une simple toile plastifiée, repliable en accordéon sur l'arrière… Il ressemblait à une Jeep réduite, mais plus trapue, plus ouverte et bien plus basse. Vu dans l'esprit des années 60, avec ses proportions carrées et angulaires, hors des modes et des normes, l'engin avait une allure de science fiction, ou de bande dessinée…!
L'engin s'appelait "Mini Moke", littéralement "Petit Âne" ou "Bourricot" !
Ce fut un véritable coup de foudre : la voiture fut immatriculée le 3 novembre 1966. Le samedi 5 au matin je me suis rendu en métro, chez l'importateur, au 53 rue du Général Delestraint, dans le 16e à Paris.
Le patron lui même, Monsieur Richard , m’a remis la clef et les papiers. Je démarrais, sortis du garage et mis l'unique essuie glace en marche ! J'ai remonté les boulevards extérieurs puis l'avenue Foch, jusqu'à la place de l'Étoile presque déserte ; il neigeait !…
J'ai descendu les Champs Élysées, les trottoirs blanchissaient et l'obélisque se perdait dans une brume cotonneuse. Les flocons, emportés par une brise glaciale d'automne traversaient l'habitacle.
Les rares passants me regardaient étrangement, j'étais trempé, j'avais froid, il ne devait pas faire plus de 4 degrés … La vie était merveilleuse !